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Gastronomie

Anne-Sophie Pic, la plus grande cheffe du monde

À 53 ans, Anne-Sophie Pic dirige 7 restaurants partout dans le monde qui cumulent 10 étoiles au Michelin. Mais elle ne se destinait même pas à la cuisine. Retour sur le parcours d’une cheffe que personne n’a vu venir.

Trois étoiles pour la maison-mère à Valence, deux à Londres, une à Paris, à Megève, à Lausanne, à Singapour… Anne-Sophie Pic a-t-elle trouvé la clé du succès ? Ce qui est sûr, c’est que pour en arriver là, la cheffe s’est reconvertie, remise en question, et surtout, elle s’est battue jusqu’à devenir la tête de la maison familiale.

Relever la Maison Pic

Après avoir passé le bac, la jeune Anne-Sophie n’a aucune envie de rejoindre le restaurant de son père. Ce qu’elle voulait faire, elle, c’est devenir styliste. Elle décide donc de se lancer dans une école de commerce. Mais très vite, ses origines la rattrapent. “C’est lors de mon stage de fin d’études, autour du champagne, que j’ai eu envie d’apprendre le métier aux côtés de mon père. Malheureusement, ça ne s’est pas passé comme je l’espérais”, se désole-t-elle. En septembre 1992, deux semaines après son retour à la maison, Jacques Pic décède d’une rupture d’anévrisme. Sans son soutien, la jeune femme n’est que simplement tolérée dans le restaurant. Elle gère la réception et le service, tandis que son grand frère devient chef de la Maison Pic, érigée dans les années 30 par le grand-père André.

En 1995, le restaurant perd sa troisième étoile au guide Michelin. “C’est comme si mon père mourait une seconde fois”, se souvient douloureusement Anne-Sophie Pic. Son frère lui laisse les rênes du restaurant, et la nouvelle cheffe opère des changements subtils, parfois peu acceptés, mais efficaces. Très rapidement, les critiques apprécient la transformation de la maison Pic par une femme. Gilles Pudlowski, fondateur des guides Pudlo, apporte son soutien dès 2001. “Anne-Sophie a apporté beaucoup de malice. Elle a tout bousculé”, se rappelle-t-il.

La place des femmes dans la gastronomie

Anne-Sophie Pic, Hélène Darroze, Adeline Grattard… Aujourd’hui encore, les cheffes étoilées se comptent sur les doigts de la main. Dans la dernière édition du guide Michelin, seules 4 des 44 nouvelles étoiles ont été attribuées à des femmes. Pourtant, elles sont nombreuses derrière les fourneaux et actuellement en formation. “Je remarque de plus en plus de femmes qui rejoignent des brigades ou qui ouvrent leurs restaurants.”, explique Coline Faulquier, cheffe de Signature, restaurant une étoile à Marseille. Dans la filière patisserie de l’école Ferrandi Paris, il y a 70% de femmes. Hélène Darroze, deux étoiles à Paris et trois à Londres, reste cependant optimiste. “La place des femmes est de plus en plus prépondérante en cuisine, j’en veux pour preuve le Guide Michelin UK qui a récompensé deux femmes, Clare Smyth et moi-même, avec l’obtention des 3 étoiles. Bien évidemment il y a encore beaucoup de chemin à parcourir car seulement 7 femmes ont obtenu cette distinction dans le monde.”

L’expansion en France et à l’international

Dès 2007, c’est la consécration. Elle devient la seule femme de France (et la troisième au monde) avec 3 macarons Michelin. Le blason de la famille redoré, Anne-Sophie Pic peut s’atteler à créer un empire gastronomique. Elle s’occupe, avec son mari David Sinapian, PDG du groupe Pic, à ouvrir de nouveaux restaurants. “Le premier, c’était le Beau-Rivage Palace à Lausanne en 2009, aujourd’hui récompensé de deux macarons. Puis nous avons imaginé La Dame de Pic, une table gastronomique dans un environnement décontracté. D’abord à Paris en 2012, puis à Londres en 2017, à Singapour en 2019, et enfin à Megève en 2021”, détaille-t-il. Au total, 7 macarons du vénéré guide Michelin, soit 10 avec la Maison Pic. 
Aujourd’hui comme à l’époque, la cheffe imagine toutes ses créations dans la Drôme, à Valence et alentour. Son laboratoire d’essai dans les cuisines de la Maison Pic voit passer tout un tas de mélanges de saveur, “pour en créer de nouvelles”, explique-t-elle. Elle choisit des produits les plus locaux possibles, pour honorer le créateur de la dynastie gastronomique Pic, fermier de profession.  Tout en gardant cette attache locale, Anne-Sophie Pic continue de s’étendre à l’international. Elle prévoit deux nouvelles adresses d’ici la fin de l’année. Une à Hong Kong – confié au jeune chef Drômois Marc Mantovani -, et l’autre à Dubai, dans la tour ultra-luxueuse One Za’abeel, au centre de la capitale émirienne.

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